Interview

Questions à Alain Rémy

C le Mag : Bonjour Alain Rémy, vous êtes auteur et illustrateur de bande dessinée depuis plusieurs années. Après un passage par le dessin de presse, vous avez travaillé pour les éditions Vents d’Ouest, l’Écho des savanes, Jungle, La Boîte à bulles ; vous avez réalisé les dessins “d’Une Histoire populaire de la France” de Gérard Noiriel, adapté en BD par Lisa Lugrin et Clément Xavier. Vous dessinez sous le pseudo Gaston. Pourquoi Gaston ?

Alain Rémy : Quand j’étais à la fac, j’avais gaffé en coupant un cours en amphi en arrivant en retard. Cette gaffe et ma nonchalance m’ont valu le surnom “Gaston” qui m’est resté. J’ai signé de ce surnom sans savoir que la BD serait mon activité principale un jour…

ClM : En 2020 vous commencez une biographie familiale par un premier tome sur votre mère “Sur la vie de ma mère” et maintenant sur votre père “Sur la tête de mon père” deux titres parus aux éditions La Boîte à bulles. Les titres sonnent-ils plutôt comme un écho à Pagnol ou comme un serment d’enfant ?

A.R. : Plutôt comme un serment d’enfant. Je trouvais que le premier titre collait très bien avec notre vie marocaine. Le second titre s’est imposé de lui-même… La référence à Pagnol est venue après. Du coup il faudra que je fasse mon “temps des secrets”  un jour…

ClM : La BD “Sur la tête de mon père” raconte l’histoire familiale du côté paternel, un certain Jean-Claude Rémy (Rémy-Bé), “le chanteur perdu” paru en 2020 chez Air Libre que recherchait Tronchet. Comment ces bandes dessinées se croisent-elles ?

A.R. : Tout est dans la BD elle-même : Tronchet écoutait les chansons de mon père étant enfant. Il était fan. Devenu adulte il a recherché le chanteur de sa jeunesse et m’a trouvé moi qui l’ai mis en contact. La suite en quatre livres, si on rajoute “Sur la vie de ma mère” et “Robinson père et fils”.

ClM : “Vous êtes Tarzan ou Lagardère ?” vous a demandé Tronchet dans la préface, d’où vient cette question ?

A.R. : C’est un extrait d’une des chansons de mon père qui s’appelle “les migrateurs” et qui s’adresse à ses enfants :

“A toi, mon fils ainé, Tarzan et Lagardère

Mon petit peu de sang coriace et solitaire

Tous mes vœux d’avenir sans trous ni écorchures

De paresse amicale et de désinvolture

Mon Migrateur Mon voyageur.”

ClM : Qu’est ce qui vous a donné envie de passer à la biographie ?

A.R. : Mon âge sûrement ? À 50 ans passés l’autobio chatouille tous les auteurs. Il me semblait que l’histoire de ma famille rejoignait aussi la grande Histoire de France et des colonies françaises. Et je venais d’écrire un ouvrage sur Boby Lapointe. Avec le “Renaud” qui vient après je suis dans une période “chanteurs”, semblerait-il.

ClM : Est-ce que raconter l’histoire de ses parents est une façon de leur montrer votre amour ?

A.R. : Bien sûr. Ma mère décédée il y a 20 ans ne le lira jamais, mais pour mon père vivant à Madagascar il est encore temps.

ClM : De Paris, au Maroc, de l’Indochine à Madagascar, le voyage est-il le reflet de l’idée de liberté que prônait votre père ?

A.R. : Oui, mais pas que. On voyage aussi pour fuir quelque chose, ou parce que les aléas de l’Histoire en marche nous obligent à migrer. Et la liberté des uns emprisonne parfois les autres. Un parent qui s’en va, c’est un parent qu’on ne voit plus…

ClM : “Est-ce l’époque qui était formidable ou nous, parce qu’on était jeunes ?” (p. 288) C’est quoi pour vous être jeune ?

A.R. : Dans le contexte de cette phrase, il s’agissait de dire que ceux qui répètent à tout va “c’était mieux avant”, parlent d’abord d’eux-mêmes, quand ils étaient jeunes et en forme. Je pense que “Sur la vie de ma mère” est un livre sur l’enfance et la maternité, et que “Sur la tête de mon père” un ouvrage sur la vieillesse et la paternité.

ClM : “On vit une époque formidable” disait aussi Reiser, qu’est-ce qui, pour vous, rend la vie formidable ?

A.R. : Les voyages, la liberté, l’amour, le sexe (je les distingue) … et faire un métier qu’on aime.Et ne pas avoir peur (de la vieillesse, la pauvreté, la solitude, la maladie, etc.). Pour moi ce qui ruine la vie des gens, ce sont leurs peurs.

ClM : Père à votre tour, vous encouragez, dans l’album, votre fils à porter cette envie d’explorer le monde… Porte-t-il déjà cette soif de liberté inscrite dans l’histoire de votre famille, comme s’il portait déjà votre prochain récit ?

A.R. : Mon fils est encore jeune, il se cherche… Mais concernant ma fille qui a 30 ans, c’est clair et net. Elle déteste les CDI et adore les tampons sur son passeport. Mais la liberté se paye toujours, et parfois assez cher, y compris financièrement.

ClM: Quels sont vos prochains projets ? Du jeu vidéo ou de la BD ?

A.R. : D’ici la fin de l’année va sortir un roman graphique que je réalise avec le journaliste Bertrand Dicale, une biographie du chanteur Renaud, un gros pavé de 300 pages encore. Je suis un fan de cet artiste depuis toujours. Et avant ça je compte apporter “son” livre à mon père, sur son île lointaine là-bas…

 

ClM : Merci à vous et nous aurons le plaisir de vous retrouver à Lodève à la Librairie un point un trait pour une rencontre autour de votre roman graphique “Sur la tête de mon père” paru aux éditions La Boîte à bulles.

A.R. : Avec grand plaisir, et je vois que vous avez lu ma BD avec attention et ça m’honore. À bientôt, donc…

Stephan Pahl

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